First Last
La série dansée
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 «Pourquoi et comment j’ai crée First Last la série dansée? » – par Charlotte Nopal

Février 2018.  Je lis le Monde. Précisément, je dévore littéralement leur nouvelle rubrique, intitulée « s’aimer comme on se quitte ». Il est écrit en pitch : « Deux jours dans la vie des amoureux. Le premier parce que tout s’y joue, le dernier parce que tout s’y perd. A chacun de deviner ce qui s’est passé entre-temps. »  Eclair dans mon esprit. J’ai toujours voulu comprendre pourquoi deux personnes pouvaient s’aimer un jour puis se quitter un autre. Malheureusement, ici, des pièces me manquent. Une seule personne témoigne.

  • Que devient l’autre dans l’histoire ? Je veux répondre à cette problématique

Faisant echo à ma vie personnelle et à ce que j’entends des histoires d’amour de ma génération,  il me devient nécessaire de créer les premiers et derniers instants jalonnant l’histoire d’amour de deux êtres, Du point de vue de l’un, mais aussi de l’autre.

Sans imposer l’histoire, donner la possibilité au spectateur de deviner ce qui se passe entre ces instants, et pourquoi l’histoire d’amour, à priori ici ne fonctionne pas.

Je veux ainsi, à travers First / Last éveiller l’imaginaire de mon futur public pour le placer, sans l’imposer, co-créateur de l’histoire.

  • « J’aime les histoires, les films… et Netflix. Mais j’aime aussi, surtout, le spectacle vivant. »

Nos vies et nos histoires évoluant maintenant physiquement « dans le monde réel », mais aussi numériquement, « dans un monde immatériel » l’idée s’impose très vite à moi :

 First Last, doit se dévoiler sous la forme d’une série dansée, découpée en plusieurs épisodes: 2 épisodes à découvrir en scène, 3 épisodes vidéo, sur un site-œuvre. Pour guider le public, dans cette histoire,  je souhaite aussi révéler des indices photos-vidéos que je destine aux réseaux sociaux. 

  • UNE CHOREGRAPHIE DRAMATURGIQUEMENT SOUTENUE , CINÉMATOGRAPHIQUE.

Place au scénario. Je crée d’abord mes personnages. Ils s’appellent Paul et Jeanne. Ils ont leur propre histoire, et donc leur propre vocabulaire. Des gestes simples chacun, presque quotidiens, définissent leur perception de l’amour.

A travers la vidéo, je vais ancrer ma dramaturgie dans un décor « réel », reconnaissable par tous-tes. Grâce au plateau, je vais utiliser l’espace et une scénographie soignée, poétique pour révéler l’essence des points de vues de Paul et Jeanne, par le mouvement.

  • UN DIALOGUE CORPOREL, VISUEL ET SONORE

En m’appuyant sur la répétition, le rythme, et l’incarnation du mouvement, j’imbrique, désoriente et distend leurs gestes.  Une inspiration de la danse-théâtre, teintée d’un esthétisme des comédies musicales. Leur histoire naît. Je cible, lors de cette composition, des moments particuliers de la relation à deux. L’univers musical me permet de guider les personnages dans leurs instants. Je pense l’évolution sonore comme des indices d’une première narration au public.

  • « L’EXPERIENCE DU PUBLIC LE COEUR DE MON PROJET »

Avec First Last, j’invite le public à se réapproprier l’histoire. Je n’impose rien mais propose les instants de Paul et Jeanne : certains à distance, derrière un écran , puis d’autres, par sa présence physique, dans la salle. Deux moyens pour démêler la réalité d’une même histoire. le public vivra ainsi les instants de Paul et Jeanne, à travers deux points de vue différents, comme deux possibilités d’expériences : First ou Last. La boucle serait-elle bouclée ? 

  • Réinterroger le public et  l’art vivant dans notre monde d’aujourd’hui

Mon choix de raconter cette histoire par le spectacle les court-metrages et les réseaux sociaux, répond à un premier sujet important à mes yeux :  me rapprocher au plus près de ce qu’il se passe dans nos vies sentimentales et interroger notre perception de l’Autre et de son expérience à travers des moments morcelés que l’on découvre de lui. 

Il me fallait aller plus loin encore : pour inclure réelllement le point de vue du public sur cette histoire, pourquoi ne pas l’emmener à devenir co-créateur de nouveaux instants First Last ? 

Avec pour support  les épisodes déjà éxistants,  le langage chorégraphique traduit « geste-mot » de Paul et Jeanne, j’ai donc imaginé : 

  • Des ateliers de co-création vidéo-danse, initiant ainsi le public à la création d’une chorégraphie et la réalisation vidéo via smartphone, 
  • des courtes performances à la suite du spectacle, créé grâce au vote du public sur les réseaux sociaux.

Choisir les thèmes universels de l’amour et de notre lien à l’Autre m’étaient évidents pour cette première création .

  • Aujourd’hui 2022 : ce que je vois de First Last la série dansée. 

Maintenant que First Last la série dansée peut rencontrer les publics,  je me rends compte que mon instinct ici, était d’inventer des personnages tels que notre société peut voir un « homme »  et une «  femme »  hétéronormées, qui se confrontent à leurs sentiments, leurs propres constructions, leurs désirs,  à leur attente vis-à-vis de l’Autre, dans notre monde d’aujourd’hui. 

Les cinq premiers épisodes de « First Last la série dansée » sont  finalement pour moi l’idée que tant que nous n’essayons pas de laisser à l’Autre sa vraie place, qu’il choisit pour lui-même et non celle qu’on lui impose, ou que la société nous dicte de celui-ci,  nous ne pouvons pas nous connecter réellement et nous vivrons alors seulement des instants, intenses peut-être, mais sans réel lien. 

A travers la possibilité des co-créations avec les publics, je laisse à l’Autre une nouvelle perception et création  nouvelles connexions possible de « Paul et Jeanne » permettant ainsi  une nouvelle narration d’émerger et peut-être qui sait, permettre aux personnages de se libérer et de pouvoir enfin se connecter.